Elle tient principalement en un fait, l’installation des moines à Plouhinec à une date indéterminée et qui a pour cause l’insécurité des côtes.
Dans les temps anciens et jusqu’à Louis XIV il n’y avait pas de police des mers et les pirates de toutes nations exerçaient leurs méfaits à peu près librement. Le commerce en était entravé et les habitants des côtes souffraient de leurs incursions.
Sous François II, duc de Bretagne, le mal arriva à point aigu (livre de la Nicolière Teit jeiro, marine bretonne au XVIème siècle Bibliothèque municipale Rennes) les pirates qu’on appelait chez nous les Câpres, se réfugiaient dans les hâvres de la Basse-Bretagne et y prenaient les navires à l’ancre. Aussi un mandatement du duc du 7 juin 1487, prescrivait « que nos sujets se mettent en armes, navires petits et grands… que tous ayant navires, petits et grands en iceux hâvres se mettent en armes et retirent en la mer et loin de terre iceux navires et aussi y retirent leurs personnes et leurs biens afin qu’ils ne chéent en danger de nos dicts ennemis…).
C’est sans doute à cette époque qu’il faudrait placer la fuite des moines de Gâvres à Plouhinec et ceux de l’isle St Michel à Ploemeur.
Ils avaient élu domicile à Plouhinec certainement avant 1553 ainsi que l’atteste un ancien titre de cette date qui mentionne que dans la chapelle de Gâvre, le prieur devait dire ou faire dire deux messes par semaine.
En 1636 voici ce qui dit sur Gâvres le voyageur Debuisson-Aubenay, auteur de l’itinéraire de Bretagne :
« La péninsule appelée Gâvres est séparée du bourg de Blavet-(Port-Louis) par un bras de mer bien fort et courant de 100 pas de largeur. Là est le hameau avec la chapelle de St Gildas, siège d’un prieuré de 3000 livres de rente, dépendant de l’abbaye de St Gildas ou Guédas, comme ils prononcent en la péninsule de Rhuys entre Vannes et Morbihan ».
« Le manoir dudit prieuré est à une lieue de là, plus loin que Riantec une lieue et demi, tout au bout de ladite péninsule qui joint à la terre ferme par un isthme de 150 ou 200 pas de largeur, un peu élevé et duquel on voit à l’est, une autre péninsule très haute et avancée en mer, vers sud appelée Quiberon.
Au bout de l’isthme de Gâvres commence un étang d’eau douce qui est assez étroit mais long d’une lieue et côtoyant la mer à 200 pas près.
Ledit manoir est possédé par le Sr de Pontroger, gentilhomme normand d’auprès de Granville et neveu résignataire séculier du feu prieur religieux de St Guédas de Rhuys ».
A noter dans ce passage deux choses : 1° la largeur du détroit : 100 pas, 2° le monastère de Gâvres est en commende c’est-à-dire entre les mains d’un laïque qui en perçoit les revenus en grande partie.
Pour avoir une idée sommaire des dépendances du prieuré il est utile de lire l’aveu fait par Dom Blaise Hurel le 7 novembre 1661.
« La presqu’île de Gâvres, paroisse de Riantec, laquelle contient environ une lieue, dans laquelle sont situés les deux villages du Gafvre et de Quersan (Quersan ou Kerso = Kersahue) dans lequel village du Gafvre est situé la chapelle fondée de St Gildas ladite isle, (presqu’île) dépend entièrement dudit prieuré. »
(mis à jour le 13 août 2013)
« Le prieur prend la 3ème gerbe de tous grains croissant sur toutes les terres de labeur qui sont aux appartenances des dix village du Gafvre et de Quersan, contenant 52 journaux et demy de plus des menues rentes sur treize tenues de ladite isle.
Les marais à sel faits et construits depuis 25 ans, situés entre les villages du Gafvre et de Quersan et qui sont au nombre de 38 œillets, avec leurs vasières et appartenances plus une pêcherie assez proche desdits marais.
La maison prieurale située dans la paroisse de Plouhinec
Le moulin à eau du Guernet (Kersun) avec la chaussée et l’étang…
La dime à la 16ème gerbe dans les frairies du bourg de Plouhinec, de Barain, de Kerfault et de Kerdanvé ?
Les chefs rentes derbes au dit prieuré aux paroisses de Plouhinec, Riantec et Merlevenez suivant le rôle réformé par le Sénéchal, procureur fiscal et greffier de la juridiction dudit prieuré, les plaids tenants au bourg de Plouhinec, le 8 juillet 1560 (le Mené prieurés et abbayes du diocèse de Vannes)
….Et nous arrivons sans en connaître davantage à la Révolution qui supprime le prieuré et ses biens.
Voici un document pris aux archives du Morbihan « Liasse 1496 » Extrait du Monastère du Rhuys dont le chef lieu est dans l’isle (presqu’île) de Rhuys, paroisse de St Gildas, Evêché de Vannes, conformément aux décrets de l’Assemblée Nationale et aux lettres du Roi.
Déclare Dom Guernerdu, procureur de Dom Nicolas Lambalivot religieux, bénédictin, titulaire du prieuré de St Gildas de Gâvres, situé dans la paroisse Plouhinec et Riantec.
« Que le monastère joint dudit prieuré, consistant en cour, maison, grange, écurie, étable, appentis, boulangerie, et un petit jardin
« plusieurs tenues à domaine congéable à la 16ème gerbe et à la 3ème et rentes de convenant, marais salants, prés et une vielle affermé cy … 1900 »
800 heures de denier d’entrée pour 9 ans, faisant par année cy??? 88 »17,9 plus le fermier paie pour la desserte dudit prieuré …………………. 78″
1900″ + 88″17″ »9 + 78″ Total de ce que paie le fermier : 2066″17″9.
Casuel des domaines congéables peut valoir année commune…….200″
Une rente foncière sur un terrain servant de presse à sardines….. 6″
Le moulin de Krousine à domaine congéable arrêté cy……………. 50″
Total des revenus dudit prieuré……………………………. 2332″17
Décimes…………. 428″18
Desserte………………………………… 78″
Total des charges……………………… 506″18
La chapelle de ce prieuré est située au village de Ban-Gâvres en la paroisse de Riantec et n’a que les ornements nécessaires : un calice et linge commun en petite quantité pour le service de ladite chapelle.
« Certifié véritable, n’ayant aucune connaissance qu’il y ait d’autres objets dépendant dudit prieuré, pour être publiés et affichés. »
« Fait au monastère de Rhuys le 22 février 1790.
Signé : QUENERDU porteur de procuration.
La maison de Plouhinec fut vendue le II mai 1791 avec son jardin, sa cour, ses écuries, ses bâtiments et ses terres pour la somme de 10 000 livres.
Les maisons de Gâvres furent achetées par le Sr BLOUEZO (archives du Morbihan, Répertoire des registres C).
Après 7 siècles de durée, le prieuré de Gâvres disparut sans espoir de retour. Ayant rendu à ses débuts de réels services, lors de la Restauration matérielle et morale du pays au lendemain des invasions normandes, il ne répondait plus, à la longue son objet et à sa fin et devait disparaître.
BOZERIE – Recteur à St Gildas de Rhuys.
FIN DE L’EPISODE SUR L’HISTOIRE DE GAVRES LE 14 AOUT 2013